Ce courrier a été envoyé au journal Libération le 11 février 2010
Nous sommes des femmes ; nous avons obtenu, grâce aux luttes menées par les générations qui nous ont précédées, la possibilité de disposer de nos corps et d’exercer nos droits citoyens et économiques, sans discrimination liée à notre sexe. Nous entendons conserver ces droits, sans nous voir imposer une bonne manière de les utiliser.
Or, Elisabeth Badinter, dans une interview à Libération (10 février 2010), critique certaines façons qu’ont des femmes, aujourd’hui, de vivre la maternité.
Pour les femmes de notre génération, le droit de disposer de son corps implique le droit de choisir la maternité si on le souhaite, de la vivre comme on le souhaite (allaitement ou non, s’arrêter de travailler ou non, etc.) et de concilier, selon nos valeurs, les choix personnels et les nécessités matérielles. Nous dénions à quiconque, d’autant plus que nos corps sont en jeu, toute légitimité à juger de la conformité de nos choix et de nos décisions. Nous dénions donc aux médecins, aux psychologues, aux organismes de santé publique, etc. la légitimité de décider de ce qui est bon pour chacune d’entre nous.
Nous dénions également cette légitimité aux philosophes et aux féministes, y compris à Elisabeth Badinter, en vertu du droit de chacune à disposer de son corps.
Emmanuelle Phan, 38 ans, ingénieure, Dali Milovanovic, 36 ans, éditrice